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Je l'ai aimé quand je l'ai quitté

La voix de Camilla Cabello résonne dans ma tête à mesure que je supprime nos photos, en tout cas celles qui trouvent leur chemin du bout de mon doigt jusqu’à mon cœur, depuis l’écran froid du téléphone. Big bang, origines qui recommencent, le souffle de la rupture emporte le monde que nous avions construit, désintègre les planètes qui gravitaient autour de nos sentiments, dérègle la langue que nous avions trouvée et tout ce qui a été nous.

Ce monde que nous avions construit n’était pas fait pour moi. Je ne m’y sentais pas libre, sans qu’il n’y ait rien qu’y m’y enferme, pas à l’aise, sans qu’il n’y ait rien qui m’y gêne. Un dédale noir aux sentiments labyrinthiques, où l’amour qui disparaît transforme tout en mensonge, l’effort en agonie et l’alchimie en lutte. Alors oui, je me suis enfoncé dans ces sinueux recoins, fuyant le plus longtemps possible le Minotaure de la vérité qui me confronterait à ce que je savais déjà.

Lorsque ce jour est arrivé, rien ne m’est venu sauf des phrases creuses et vides de sens, mais qui pourtant en avaient. Un sentiment de culpabilité horrible m’a rongé, d’autant plus fort que j’avais pris la seule décision possible. Non, je ne regrette rien, en tout cas pas encore.

À la fin des temps, tout a rejailli. Pluie de sauterelles, cavaliers de l’apocalypse, coups de marteau assourdissants qui défonçaient le silence dans lequel je m’étais emmuré. Lâcheté suprême que je payais enfin, acquittement rédempteur. Je pouvais enfin rendre tout ce bonheur que j’avais reçu et dont je ne savais pas quoi faire, ramené aux hurlements sauvages de l’inconnu qui mord.

Alors oui, le soleil s’est levé sur ces ruines de souffrances. Et que puis-je faire maintenant, sinon laisser notre avocat plaider pour moi ? Cet avocat c’est le temps, le temps qui soulage tout, qui pardonne tout et qui nous aidera elle et moi à me pardonner pour tout ça.

C’était le bon moment, probablement la bonne personne mais pas la bonne histoire. Saccage de ce qui aurait pu être, mémoire cadavérique de ce qui a vécu. Et le spectre de ma peur de l’attachement rôde autour du meurtre, sans que je sache s’il en est le complice ou l’auteur.

Les qualités, hors normes et pétillantes, de mon ancien amour me sont apparues lorsqu’elles n’étaient plus miennes. Lorsque je n’avais plus la charge insoutenable d’en profiter sans pouvoir les apprécier. Les moments que nous avons passé ensemble ne sont devenus doux que lorsqu’ils se sont transformés en souvenirs. Je t’ai aimé quand notre histoire s’est terminée, je t’ai aimé parce qu’elle s’est terminée.

Merci, et pardon.

Par Jean Dizian | @lunesnoires

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