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Roméo et Juliette en temps de confinement

Mon cher Roméo,

Alors que nos familles se détestent depuis la nuit des temps, voici que nous sommes instamment tenus de rester cloîtrés chez nous pour une durée indéterminée. Je me coltine ma mère et ma nourrice H24 qui n’ont de cesse de me répéter de ne pas trop forcer sur le gigot, de descendre prendre un bain aux étuves tous les jours « parce que c’est bon pour ma peau » et de lire la Bible en latin pour que j’aie « l’air d’être instruite ».   

S’il n’y avait que cela, encore, mon beau Roméo.

Hélas ! A-t-il fallu que nous nous rencontrâmes lors de ce bal donné par ma mère et que vous bouleversâtes mon pauvre cœur ingénu juste avant de nous confiner, séparés l’un de l’autre. Ah ! Comme je suffoque (et ce corset trop serré n’arrange rien).

Pour pallier cette nouvelle contrainte qu’est celle du confinement, j’avais prévu de me mettre à mon balcon pour vous déclarer ma flamme de la plus belle et plus sincère des manières. Mais quand je m’y suis mise, voisins et passants ont immédiatement sorti leur ombrelle de peur que mes postillons ne les atteignent. Ils m’ont, de surcroît, jeté des rouleaux de papier toilette à la figure pour que je me taise… Ces goujats !

J’ai ensuite besogné chez Poney Eat, afin de disposer d’un motif valable pour pouvoir me déplacer librement et venir directement à votre rencontre, une pizza sous le bras, vous dire à quel point je brûle d’amour pour vous. Mais, trop effarouchée, ma vieille bourrique m’a illico fichue par terre. J’en ai récolté un parfait torticolis.

J’ai ensuite pensé vous écrire une lettre. La tête complètement bloquée à droite et étant gauchère, je ne vous explique pas à quel point la tâche fut rude. La langue pendante et en louchant, je suis finalement parvenue à la rédiger entièrement. J’eus alors l’idée de vous la faire parvenir par le biais de mon fidèle messager. Toutefois, ce dernier toussait comme le bœuf de la mère Richard dans son pré en plein été et je craignais fort qu’il vous contaminât (pas le bœuf, le messager).

Ah ! Comme j’aurais voulu naître à un autre siècle, Roméo ! Celui où il serait possible de se voir et se parler à travers un objet, de s’envoyer des messages et des images par un moyen invisible... Ce serait autre chose, n’est-ce pas ? Cela ne remplacerait évidemment pas de vraies retrouvailles, de vrais baisers déposés, de vraies caresses échangées. Mais je suis certaine que cela permettrait simplement de mieux patienter en espérant le meilleur.

En l’absence de ce moyen de communication, je me languis de vous et verse, sur tout votre être, une pluie de baisers.

Juliette, votre future bien-aimée. 

A. P.

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