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Faut-il toujours sauver son couple ?

Cela faisait trois mois que nous voguions sur les eaux de nos douceurs. Nos frissons brûlants, rythmés par le clapotis des vagues semblaient ne jamais devoir s’arrêter. Je m’apprêtais à reprendre une gorgée de mojito lorsque la paille vola au dessus du verre : une collision mon capitaine, la coque a été touchée !

C’était une petite secousse, une dispute de rien du tout, mais nous n’avons pas vu toutes les autres qu’elle annonçait. Et puis un jour, l’eau a atteint nos chevilles. Nous avons dû nous rendre à l’évidence, le rafiot prenait l’eau et le ciel s’était assombri. Bien sur que je souhaitais éponger le pont et réparer ce qui pouvait l’être, mais le gilet de sauvetage me faisait de l’oeil aussi.

L’issue était tentante, ne pensant pas aux eaux glacés qui m’attendaient peut-être. A moins qu’un yacht ne passe par là… jusqu’à quand faut-il s’accrocher pour sauver une relation, à quel moment faut-il accepter de la laisser sombrer ?

Réparer ce que l’on a cassé

Se rencontrer, c’est échanger nos désirs, notre envie d’être ensemble mais aussi nos vulnérabilités. C’est écouter nos failles quand nos démons se croisent dans le vide, ces faiblesses que l’on a tûes dans les premiers mois en espérant qu’elles ne surgissent pas, comme un été dont on nierait la fin. Ces failles on les connaît, parfois on les découvre. Mais elles peuvent être le triste point commun de nos histoires passées qui assombrit l’avenir que l’on imaginait.

La fuite peut parfois être un mauvais service que nous nous rendons, c’est se balader avec son marteau pour fracasser la prochaine coque en espérant que cette fois elle ne se brise pas. On peut avoir tout à gagner à panser nos plaies ensemble, parce que l’autre nous manque ou qu’il en vaut la peine. Parce que c’est quand on se bat pour garder quelqu'un et pour rester unis que l’amour commence.

Personne n’est parfait, mais les autres semblent le devenir lorsqu’on se rend compte que notre partenaire ne l’est pas. Fêtard, en retard, tête en l’air, casanier, on s’énerve sans vouloir tout à fait le changer car ce ne serait plus lui. Le bateau prendra toujours l’eau, et notre réussite à le réparer quand cela est possible nous conduira à nous aimer davantage : le monde appartient aux bricoleurs.

Réparer un bateau qui a déjà coulé 

Cependant ici, ma situation était différente. Le rafiot n’était pas une bicoque trouée mais une épave : le bateau dont j’épongeais l’eau gisait déjà au fond de l’océan, mes outils heurtaient un bois déjà rongé par l’eau salée. Fantôme déjà mort, bouche à bouche cadavérique.

Parfois, l’autre est déjà parti et nous refusons de voir que l’on discute avec son ombre. Quand nos yeux se croisent, lui ne voit déjà plus qu’un souvenir. Nous réparons alors des fêlures qu’il rouvre sans arrêt, volontairement ou par négligence. Nous nous abandonnons nous même et à ne pas y prendre garde nous pourrions suffoquer tout au fond du mirage aquatique.

On le ressent lorsqu’on ne se sent plus nous-même dans une relation, lorsque les efforts que l’on fait sont proportionnels à l’angoisse qu’elle nous procure. Quand on se sent mal lorsqu’on n’est pas avec la personne au lieu de se sentir mieux quand elle est avec nous. Certaines relations sont toxiques avant tout pour nous-même, et à trop fermer les yeux on peut boire la tasse en plein milieu d’une marée noire.

Pour le savoir, encore faut-il essayer de la réparer, se retrousser les manches et se mettre à l’ouvrage ensemble. Quand on s’aperçoit que cela n’est pas possible, on quitte enfin la fosse on l’on gisait. On redécouvre que la surface de l’eau est pleine de remous ensoleillés, de nouveaux bateaux qui n’attendent que notre corps languissant pour lézarder des heures au soleil. Des frissons et des rires que nous avions oubliés, laissant tout au fond l’épave du souvenir.

Les heures passées à réparer d’anciennes relations ne sont jamais perdues. Elles permettent à nos futurs bateaux d’être mieux réparés et nous indiquent aussi lesquels méritent, pour notre bien, de l’être.

Par @LunesNoires | Jean Dizian  

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