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Comment la série Mr Robot m'a aidé à gérer mon anxiété

Hello, friend.

Le jeune homme a le teint pâle et les yeux globuleux. Vouté sur son écran, les lignes de code défilent sur sa rétine. Il s’appelle Eliot. Sur son clavier, il exécute fiévreusement le ballet numérique de la cyberattaque. Une voix grave, en fond, nous explique qu’ayant du mal à trouver sa place, hacker le monde est sa manière à lui de participer, de se connecter aux autres. Eliot, est le personnage principal de la série Mr. Robot, une série que j’ai finie récemment.

Eliot n’est pas seulement un hacker virtuose, c’est aussi un marginal accroc à la morphine qui souffre de profonds troubles psychiatriques : anxiété sociale, paranoïa, schizophrénie. Nous assistons au calvaire d’Eliot dans notre propre rôle, celui de cet observateur silencieux. Nous incarnons l’une des innombrables facettes de sa psychologie éclatée et complexe.

On est surpris de voir à quel point, bien qu’on se sente éloigné de sa situation, on s’identifie à tous ses problèmes, à quel point les boucles qui tournent dans sa tête sont aussi les nôtres.

Tout nous ramène à la question que pose Eliot à un moment : « à partir de quel degré la folie n’est plus normale ? ».

Quand il lance ses attaques malveillantes, c’est notre propre code qu'Eliot dévoile. Nos boucles infinies, nos blocages, nos limitations techniques actuelles, les aspects de notre logiciel qui ont besoin d’une mise à jour.

Les moments qui m’ont le plus marqués dans la série sont ceux durant lesquels la réalité d’Eliot bascule. La mise en scène est toujours la même : Eliot réagit normalement à la situation qui se présente à lui. Il va par exemple essayer d’embrasser une fille qui lui fait des avances. Son comportement est cohérent avec ce que l’on comprend de la situation. Pourtant, la personne en face de lui a un mouvement de recul, effarée. Un silence pesant s’installe, les deux protagonistes se fixent dans une incompréhension mutuelle. Finalement, la personne rompt le silence et demande à Eliot : « où penses-tu que tu te trouves, Eliot ? Qui penses-tu que je suis pour toi ? ».

À ce moment, le sol se dérobe sous les pieds du jeune homme. Eliot se rend compte qu’il habitait dans sa maladie mentale, les choses ne sont pas ce qu’elles semblaient être. Une partie du château de carte vient de s’effondrer. Et on avance comme cela jusqu'à la réalisation finale, violente et impardonnable.

La série a fait écho à de nombreux questionnements en moi. Je ressens aussi ce petit Mr. Robot perché sur mon épaule, qui me murmure parfois que je ne suis pas assez bien, pas assez doué, pas assez grand. Il est terrifié et paranoïaque, obsédé par le contrôle d’une réalité qui lui échappe. Il essaye de me convaincre de faire des choses pour échapper à des catastrophes qu’il crée lui-même à force d’anxiété. Comme Eliot, j’ai appris à faire la paix avec mon démon. Je n’essaye plus de le tuer, et quand il est là, on chill ensemble.

La métaphore du code informatique m’a fait penser à la psychothérapie. C’est quand on prend du recul sur nos attitudes qu’on réalise qu’on vivait dans l’inconscience. Condamné, comme les machines, à répéter la même suite d’actions qu’une situation extérieure déclenchait. Encore et encore, exécuter le même code, de manière automatique. Prendre du recul, c’est identifier nos schémas répétitifs, c’est se donner la possibilité de lire notre propre code, d’en interrompre la lecture et éventuellement de le modifier.

Alors, si comme le clame Eliot, le contrôle est illusion, détachons nos ceintures et appuyons sur l’accélérateur. Débusquons les malwares nichés dans notre système et puissions-nous parvenir à la dernière version, celle qui ouvre le fichier bonheur.exe.

Par Jean Dizian | @lunesnoires

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